Dunkerque. Le poids des Belges dans la balance
Les progrès accomplis par Féron de Clebsattel n'ont pas suffi. Doubler le trafic de l'acier en faisant appel aux synergies internationales : c'est le but qu' IFB France se propose d'atteindre d'ici à 2002. C'est un contrat de prestation portuaire portant sur, au minimum, un million de tonnes de produits sidérurgiques manutentionnés qui vient de changer de mains. IFB France, nouvelle holding créée par Inter Ferry Boat, opérateur de combiné et interface portuaire de la SNCB (les Chemins de fer belges) devient l'opérateur du terminal aux aciers à Dunkerque, par volonté de son premier client le groupe Usinor. IFB France crée une filiale, Acimar pour remplir la mission. Ces derniéres années, le terminal a manutentionné environ un million de tonnes de produits plats laminés à froid d'assez grande valeur, destinés au Royaume-Uni, à la péninsule ibérique et à l'Amérique du Nord. Depuis le 1er janvier 1996, Féron de Clebsattel, alors filiale de Geodis, aujourd'hui relogé dans SNCF Participations tenait ce rôle à travers sa filiale Féron Terminal. Ce contrat d'exploitation, confié à un opérateur pleinement responsable devant son client, a été l'une des premières applications de la réforme portuaire de 1992. Celle-ci ne portait pas seulement sur le statut des dockers, mais aussi sur l'organisation des terminaux. Le secteur privé devait y prendre une place croissante auprès des établissements publics portuaires, et l'opérateur responsable devait assumer une pleine responsabilité de prestataire de service face à ses clients. En l'occurrence, le groupe Usinor et ses filiales Sollac, GTS-Dilling, Ascométal était et reste le client ultradominant, pour ne pas dire le seul. Le Port autonome pour l'infrastructure, et Féron Terminal pour les équipements avaient investi plus de cinquante millions de francs pour satisfaire leur client. Le terminal emploie plus de cent dockers. C'est une installation industrielle, comportant un entrepôt étanche servi par deux ponts roulants et un maténel informatique sophistiqué, sous certification ISO 9002, qui traite quelque 25 000 wagons par an. Acimar négocie la reprise d'une partie des équipements et la quasitotalité du personnel. Pourquoi ce changement ? Féron Terminal a accompli en cinq ans des progrès impressionnants dans la gestion des flux. Mais chaque année, l'industriel client, « comme nos propres clients », commente Guy Amédro, directeur transports d'Usinor, demande mieux au même prix, ou moins cher, ou les deux. Les négociations de l'an 2000 n'ont pas abouti. Pourtant Usinor n'est pas zappeur, « Notre politique d'achat de prestations consiste en la recherche de partenariats de longue durée, approfondis et élargis, dans la recherche de progrès partagés », indique Guy Amédro. Autrement dit, le donneur d'ordre et le sous-traitant doivent travailler ensemble à la recherche de productivité et de baisse des coûts. Le fait que les deux prestataires soient filiales de deux réseaux ferroviaires « n'a pas joué dans la négociation », assure Guy Amédro. Le sidérurgiste français, mais aussi belge et allemand est le premier client de la SNCB comme de la SNCF tout comme Usinor est le premier chargeur à Anvers comme à Dunkerque. Par ailleurs, les deux réseaux de fret coopérent de plus en plus étroitement, en direct et notamment à travers IFB, C.N.C. Transports et nécessairement Féron de Clebsattel comme opérateur portuaire. Marc Dubois, directeur général d'IFB, déjà actionnaire de l'opérateur du terminal à conteneur du port de Dunkerque parle d'une « relation intense » à venir avec son client. Il se donne pour objectif de doubler le trafic à deux millions de tonnes d'ici à fin 2002. Un objectif ambitieux qui ne peut aboutir sans l'apport d'autres clients, d'autres entreprises, d'autres régions ou de l'étranger. Des synergies joueront. On emportera de l'acier en conteneurs sur le terminal dunkerquois. La SNCB est aussi l'actionnaire de Haeger & Schmidt, transitaire et manutentionnaire spécialiste de l'acier à Duisbourg et à Anvers, prestataire logistique en particulier pour Thyssen Krupp. Des compétences internationales qui ont sans doute pesé dans la balance, en tout cas dans les calculs de prix et de volume de Marc Dubois.
Alain SIM0NEAU La Vie du Rail - 17 janvier 2001